Excellente note de Jean-Marc Vittori aujourd'hui dans les Echos concernant le calcul "post mortem" de la taxe professionnelle, afin de garantir aux collectivités locales son remplacement "à l'euro près". Je reporte l'article ci-dessous.
"Joli cadeau pour un jeune créateur d'entreprise. A quelques jours de Noël, il vient de recevoir une déclaration d'impôts à remplir pour la Saint-Sylvestre. Mais pas n'importe quelle déclaration : celle pour la taxe professionnelle que le Parlement vient pourtant de rayer de la carte fiscale. Par chance, le service des impôts avait eu vent du projet, annoncé par le président de la République le 5 février dernier. Pour éviter de donner un coup au coeur du créateur déjà éprouvé par sa rude aventure entrepreneuriale, la déclaration est donc accompagnée d'une lettre touchante signée par la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, et son collègue du Budget, Eric Woerth. Oui, la TP est bien supprimée. Mais l'Etat a tout de même besoin d'avoir des éléments « afin de calculer le plus exactement possible les ressources que percevront en 2010 les collectivités locales. »
En contribuable averti, le jeune créateur s'interroge. Vais-je vraiment devoir remplir une déclaration pour ne rien payer ? C'est évidemment louche. C'est pourtant la conséquence ubuesque du dispositif retenu. L'Etat a en effet promis en 2010 de verser aux collectivités locales « à l'euro près » ce qu'elles auraient perçu si la taxe n'avait pas été éliminée par une décision du prince. Le fisc doit donc partir à la chasse aux informations « à l'euro près », y compris chez les créateurs qui n'ont pourtant pas grand-chose à déclarer dans la quasi-totalité des cas. Il faut sans doute voir ici la trace de la « simplification administrative » chère au coeur d'Eric Woerth.
En bon citoyen, le jeune créateur se plonge, entre 1 et 2 heures du matin, dans ladite déclaration. Et là, il y a une forme de récompense. Car il découvre enfin le rare bonheur du formulaire 1003P. On lui demande s'il a des apprentis sous contrat, des éoliennes, des camions d'un PTAC ou tracteurs d'un PTRA ≥ 16 T et autocars de 40 places assises, voire des centrales nucléaires (comme si le comptable d'EDF ne savait pas quelle case remplir). Et puis, il se promène dans les fameuses niches fiscales que certains ont su bâtir au fil des ans : investissement en Corse, vétérinaires ruraux, librairies indépendantes, création dans les zones de resturcutration de la défense en vertu de l'art. 1446 A-I quinquies B du CGI… Merci à Bercy pour ce pur moment de poésie administrative dans le cercle des impôts disparus. On en redemande."
JEAN-MARC VITTORI, Les Echos
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